lundi 8 décembre 2008

Fondation P&V | Note d'intention - Francophones, néerlandophones : comment dialoguer avec l'autre ?

"Francophones, néerlandophones : comment dialoguer avec l’autre ?"
Un forum d'histoires

1. Introduction
Nous allons expliquer ci-après le mode de fonctionnement du volet Fondation P&V du projet européen portant sur le dialogue interculturel. Ce projet européen vise trois objectifs :

- Développer une plateforme permettant de réfléchir au dialogue culturel, à la signification du concept et à sa relation avec la citoyenneté européenne;
- Comparer la perception et l’expérience pratique au sein de la vie en société des différents états membres;
- Lancer un dialogue interculturel entre les différents groupes de travail.

La Belgique a décidé de choisir le thème de la diversité linguistique comme sujet de participation. A cet effet, nous souhaitons lancer un forum d'histoires racontées par quelque quarante à cinquante citoyens volontaires.

Pour commencer, nous allons exposer brièvement la problématique telle qu’elle se pose. Ensuite, nous parlerons de la façon dont nous considérons ce sujet et dont nous souhaitons l'aborder. Par après, nous expliquerons notre méthode de travail. Pour terminer enfin, nous allons décrire l'organisation des réunions de nos groupes de travail.

2. “This is how the story goes” ou la diversité linguistique en Belgique
Depuis 1993, la Belgique est un Etat fédéral. Le Royaume est divisé en 3 régions (la Flandre, Bruxelles et la Wallonie) et 3 communautés linguistiques (flamande, française et germanophone). En chiffres, la Belgique se présente comme suit:

Population belge (2008)
- Région de Bruxelles Capitale: bilingue, avec une majorité de francophones : 1.048.491 hab.
- Flandre: majorité de néerlandophones : 6.161.600 hab.
- Wallonie: majorité de francophones avec une petite population de germanophones (74.565 hab.)- : 3.456.775 hab.
- Total : 10.666.866 hab

L'histoire du pays est marquée par les conflits linguistiques. La fameuse frontière linguistique est considérée comme l'une des trois lignes de faille (avec les conflits entre catholiques et libéraux d’une part, entre la gauche et la droite d’autre part) qui ont régulièrement entraîné des conflits et divergences politiques au fil de l'histoire de la Belgique.

Le conflit communautaire s'est récemment exacerbé. Il est généralement décrit – principalement par les médias – comme une discorde entre les deux groupes linguistiques les plus importants: les francophones et les néerlandophones. Il n'est pas rare que cela se passe d'une façon telle que ces deux communautés linguistiques sont de facto des ennemis historiques qui se confrontent de manière brutale.

Il est frappant de constater que le conflit communautaire actuel est marqué par l'absence de dialogue entre les communautés linguistiques. Il est très probable que le bilinguisme ait perdu du terrain, certainement en Flandre. Par ailleurs, les communautés linguistiques n'ont pas d'enseignement en commun, pas de médias en commun, pas de politique culturelle partagée ni de partis politiques communs. Dans les faits, les communautés s'éloignent l'une de l'autre sur le plan culturel.

C'est en raison de cette situation que, dans le cadre du projet européen portant sur un dialogue interculturel, la Fondation P&V a opté pour un dialogue entre les groupes linguistiques. Etant donné que nous perdons le dialogue et le contact, celui qui parle une autre langue est en quelque sorte considéré comme un 'étranger'. On tombe alors par la force des choses dans des clichés, stéréotypes et préjugés qui bloquent véritablement la communication interculturelle entre les différents groupes de population.

Peut-être ceci constitue-t-il une bonne raison de commencer par le commencement et ce, en réunissant les parties 'en guerre'. Ce qui permettra de réapprendre à connaître et à comprendre l'histoire de l'autre. Tel est précisément l'objectif de nos groupes de travail. Nous souhaitons stimuler l'interculturel en mettant directement en contact un groupe de citoyens. Pas pour provoquer la discussion mais bien pour écouter les histoires des autres et relancer ainsi le dialogue.

3. “You know the story” ou pourquoi une histoire?
Etant donné que celui qui ne parle pas la même langue est parfois considéré comme un 'étranger', une conversation directe s'avère souvent difficile. Par ailleurs, elle se heurte essentiellement à une série de clichés et de préjugés. Nous avons donc décidé de tenir compte de cette réalité et nous voulons justement mettre ces "préjugés" en évidence lors de nos réunions. Nous prenons donc comme point de départ des histoires ou témoignages en rapport avec la diversité linguistique en Belgique. Il n'est aucunement question de discussion politique relative à l'actuel conflit communautaire. Deux raisons expliquent notre démarche: la première se situe au niveau de la société même. Nous souhaitons en effet accorder de l'attention à la façon dont une société s'organise. La deuxième raison se situe au niveau des groupes de travail et concerne la dynamique d'un dialogue. Je vais donc expliquer les deux motivations qui expliquent notre choix méthodologique d'un forum d'histoires.

3.1 “The moral of the story” ou la perspective du discours
Pour former une identité, des individus mais aussi des sociétés entières utilisent des histoires. Les histoires servent bien souvent à expliquer une position personnelle, mais aussi à justifier nos problèmes et échecs. Certains affirment que l'homme est en fait un animal qui raconte des histoires.

Nous éprouvons cependant aussi le besoin, en tant que société, de trouver une façon de nous organiser et surtout, de justifier notre ordre social. Au fil de notre histoire, des récits ont servi à cet effet de moyen d'accès. Depuis les mythes grecs jusqu'à Hollywood, des histoires sont utilisées pour expliquer aux autres nos émotions, nos valeurs et nos habitudes.

Lorsque ces histoires sont utilisées pour concrétiser des normes et valeurs sociales, elles sont parfois appelées des discours. Les discours peuvent être considérés comme des histoires générales qui tentent de conférer une unité à un groupe d'individus. Ce qui signifie que nous utilisons une histoire comme moyen d'expliquer - à nous-mêmes et aux autres - le passé et le présent d'une société.

Ces discours sont toujours repris par un groupe déterminé dans la société et sont compris par la plupart des gens. Ils sont surtout importants lorsque des problèmes surgissent entre un groupe déterminé et le reste de la société. En ce sens, les discours sous la forme d'histoires exercent une fonction thérapeutique. Nous sommes ainsi en mesure d'exprimer nos problèmes et nos sentiments sous une forme que nous connaissons particulièrement bien. Une histoire nous aide à définir et à interpréter notre environnement et ce qui s'y passe.

Le fait que les histoires jouent un rôle dans la détermination, l'explication et l'utilisation de valeurs sociales a été illustré dans l'étude de Bonilla-Silva, Lewis et Embrick. Ces auteurs ont démontré comment les Américains ont tenté de justifier leur attitude vis-à-vis de leurs concitoyens noirs à l'aide d'une série d'histoires récurrentes (2004). David Boje a également démontré comment les gens utilisent des structures de récit dans la vie de tous les jours. Il a suivi les membres du personnel d'une société d'accessoires de bureau et a découvert qu'ils expliquaient la société et le rôle qu'ils y jouent à l'aide d'une histoire (1991). Il a constaté que de nombreux entretiens mutuels concernant le travail étaient 'moulés' dans une structure de récit bien déterminée. Comme si l'organisation complexe d'une société était ainsi plus facile à cerner pour les travailleurs. Barbara Czarniawska donne un exemple similaire lorsqu'elle a recueilli les histoires de mécaniciens et conclut: “The technicians’ stories are not ‘organizational stories’; they are ‘stories that organize’” (p.40, 2004). Le fait que les valeurs et problèmes sociaux peuvent être facilement transposés dans des structures narratives a été démontré de façon originale par Sabine Chalvon-Demersay. A l'aide d'une analyse de 817 scénarios télévisés envoyés pour un concours, elle a démontré que l'on retrouvait toujours les mêmes discours sociaux. En dépit de la grande variété de thèmes et de sujets, elle a malgré tout toujours retrouvé à quel point l’absence de liaison sociale entre autres, constitue un manque. Ceci explique également l’importance de l’impact exercé par les médias sur le développement social et la constitution de valeurs. Ils présentent sans cesse des histoires sur le monde dans lequel nous vivons et les problèmes qui nous entourent. De cette manière, les médias peuvent agir comme une sorte de psychanalyste qui transpose nos angoisses, nos doutes et nos sensations de malaise en histoires compréhensibles, que celles-ci se soient réellement produites ou non.

En ce qui concerne la diversité linguistique également, nous avons tous notre histoire 'prête'. Ceci avant tout parce que les 'adversaires' ne sont pas toujours en contact direct. Donc, si nous voulons comprendre la problématique entre francophones et néerlandophones, il faut avant tout apprendre à connaître les histoires qu'ils racontent les uns sur les autres. Comment la disparité entre ces deux communautés est transposée dans une structure d'histoires. Quels stéréotypes, clichés et préjugés sont utilisés pour ce faire? Si nous souhaitons organiser un forum d'histoires, c'est avant tout parce que nous estimons que les histoires représentent des mécanismes importants au sein d'une société et que c'est par le biais d'une histoire que nous pouvons exprimer et communiquer le plus facilement nos idées et nos frustrations. Nous espérons dès lors que les groupes de travail vont nous raconter leurs histoires concernant 'l'étranger' qui parle une autre langue. Ceci afin de parvenir à mettre à nu le discours social sous-jacent.

3.2 “Tell me your story” ou le dialogue public
Mais il y a une autre raison pour laquelle nous avons délibérément choisi de créer un forum d'histoires. Et elle concerne la dynamique de groupe en elle-même. Le problème que l'on rencontre souvent lors des conversations dans un groupe est qu'elles dégénèrent régulièrement en discussions virulentes. Le grand inconvénient d'une conversation est en effet qu'elle exige parfois beaucoup d'efforts de la part des participants. Tout le monde n'a pas la capacité de formuler très précisément ses idées. Et tout le monde n'est pas sûr non plus de son avis. Le grand inconvénient est que l'on assiste à l'apparition d'une majorité silencieuse ou d'un groupe de gens qui ne savent ou n'osent plus rien dire. Nous voulons malgré tout connaître la pensée de ces gens et savoir ce qu'ils ont réellement vécu. Il n'est pas toujours nécessaire de savoir qui a raison, mais nous pouvons toutefois tenter de tirer des enseignements l'un de l'autre.

C'est donc la raison pour laquelle nous ne souhaitons pas que notre dialogue interculturel revête la forme d'une discussion ou d'un débat. Nous désirons au contraire mettre sur pied un forum d'histoires. Nous sommes en effet d'avis qu'il est impossible que tout le monde entame le dialogue en étant dénué de préjugés. Nous voulons dès lors que ces gens bénéficient de la possibilité d'exprimer ces préjugés, ces clichés et ces stéréotypes sans être interrompus par les autres participants. Un forum d'histoires constitue la meilleure façon d'y parvenir.

Partant de cette idée, un forum d'histoires est susceptible de présenter deux avantages dans la pratique. En premier lieu, il peut nous aider à permettre aux participants de développer une identité au sein du groupe. Par ailleurs, les autres participants seront ainsi mieux à même de comprendre la perspective de cette identité.

Le fait que raconter une histoire peut nous aider à développer une identité, est avant tout à mettre en rapport avec la façon dont cela nous permet d'exprimer nos propres expériences et de les relier entre elles. Une histoire nous permet d'effectuer une reconstruction de ce que nous savons, de ce que nous avons vu ou entendu. A l'intérieur de notre histoire sociale, nous pouvons nous transformer et/ou transformer les autres en 'personnages' reconnaissables.

Ceci nous amène au deuxième avantage d'un forum d'histoires. A savoir la possibilité de comprendre le point de vue ou la perspective de l’autre. Nous pouvons ainsi comprendre les histoires comme une manière de faire clairement comprendre à un autre la façon dont nous voyons les choses. Nous pouvons par exemple expliquer plus facilement quand et comment quelque chose s'est passé. Ainsi, l'autre connaît l'histoire qui vous concerne ainsi que vos points de vue. Dans un dialogue de groupe, nous pouvons dès lors mieux identifier nos interlocuteurs.

De ces deux façons, un forum d'histoires peut ainsi faire le lien entre les participants afin qu'un dialogue public devienne possible avec un nombre minimum de participants silencieux. Ce lien est indispensable pour lancer le dialogue entre les deux communautés linguistiques.

4. “Let’s get the story straight” ou la recherche d'une meilleure histoire
L'objectif de nos groupes de travail est de susciter un dialogue interculturel et non pas une discussion interculturelle. Un dialogue qui permet en fin de compte de trouver une solution ou, à tout le moins, une meilleure histoire. Pour ce faire, nous allons réunir à cinq reprises un groupe de gens et les confronter avec leurs histoires ou témoignages mutuels. L'objectif de ces réunions est donc triple : raconter des histoires, réfléchir ensemble à ces histoires et rechercher la 'meilleure' histoire.

Pour commencer, il nous appartient d'inciter les participants à nous faire part de témoignages, expériences et préjugés et de leur permettre de les partager sans être dérangé. Nous voulons leur offrir la possibilité d'exprimer plus facilement leur point de vue en tant que francophone ou néerlandophone. La meilleure façon d'y parvenir est de leur permettre de raconter tout cela dans une histoire ou un témoignage.

Est-ce le but de ne pas communiquer les uns avec les autres? Que du contraire! Mais seulement lors d'une seconde phase. Après avoir entendu les histoires des autres, nous pourrons comprendre un peu mieux les autres participants et nous connaîtrons leur point de vue.

Pour rendre ensuite possible une réflexion concernant les histoires, une analyse scientifique des histoires racontées sera effectuée. Le but est d'extraire du lot les histoires les plus populaires. Quels sont les clichés, stéréotypes et préjugés les plus fréquemment rencontrés ? Quels sont les problèmes qui se présentent le plus souvent dans un pays bilingue ? Nous nous mettrons donc en quête de quelques histoires récurrentes et nous les présenterons à nouveau. Nous espérons ainsi susciter un dialogue nuancé et non pas une discussion virulente.

Pour terminer, ce dialogue devra également nous permettre d'aboutir quelque part et de préférence de nous amener à une histoire commune. Nous voulons obtenir une histoire reconnaissable aussi bien par les francophones que par les néerlandophones. Pour arriver à ce résultat, nous n'allons pas seulement comparer les histoires entre elles mais nous allons également rechercher les histoires positives et négatives que les deux groupes linguistiques racontent l'un sur l'autre. Nous espérons dès lors pouvoir reconstituer une image globale dont le résultat sera une histoire 'translinguistique'.

Concrètement, cela signifie que nous allons répartir les cinq réunions comme suit:

Un forum d'histoires, de quoi s'agit-il? (26 novembre 2008)
Lors de la première réunion, nous voulons surtout motiver les participants et leur expliquer en quoi consiste un forum d'histoires. Nous devons notamment leur expliquer pourquoi nous voulons qu'ils nous racontent des histoires et comment ces histoires peuvent finalement conduire à un dialogue. Pour y arriver, nous allons leur fournir des explications concernant l'origine et le but de l'étude mais également leur procurer quelques exemples d'histoires.

A la fin de cette première réunion, les participants repartiront avec une mission concrète: ils devront réfléchir à une histoire négative. Ce qui signifie que, sur la base de leurs expériences, de celles d'autres personnes ou des médias, ils pourront présenter un témoignage illustrant pour eux l'un des problèmes causés par la diversité linguistique en Belgique.

Premier forum d'histoires (13 décembre 2008)
L'objectif de la deuxième réunion est d'offrir aux participants la possibilité de raconter leur histoire chacun à leur tour. Ceci se passera dans un premier temps en petits groupes. Un dialogue plus général pourra ensuite être mené. Les francophones et les néerlandophones pourront faire comprendre dans leur langue quels sont les problèmes et comment ils considèrent leur position ou celle des autres.

A la fin du premier forum d'histoires, les participants pourront déjà aider les chercheurs à poser les jalons de leur discours. Ceux-ci pourront se mettre à réfléchir une première fois au contenu de ces histoires et se demander pourquoi elles sont racontées.

Feed-back aux participants (4 février 2009)
La troisième réunion devrait déjà – sur la base des histoires – permettre de lancer un dialogue. Les chercheurs auront eu le temps d'analyser les histoires négatives et d'examiner à quel point elles sont générales. L'objectif est de donner un feed-back de certaines histoires et de soumettre quelques questions aux participants:

· Estiment-ils que ce discours est reconnaissable ?
· Estiment-ils que ce discours est compréhensible ?
· D'où provient à leurs yeux ce discours (médias, hommes politiques, histoire, …) ?
· Les participants sont-ils d'accord avec le discours ?

En fin de compte, le but est de tester le quotient de 'véracité' et le quotient de 'reconnaissance' des histoires. Qu'en pense le groupe?

A la fin de ce dialogue public, nous chargerons à nouveau les participants d'imaginer une histoire. Cette fois cependant, ils devront réfléchir aux avantages d'un pays bilingue comme la Belgique. En quoi cela peut-il se révéler utile ? Quelles sont les expériences positives vécues par les participants avec l'autre communauté linguistique ? Ou par quelle histoire concernant les 'autres' ont-ils été agréablement surpris ?

Deuxième forum d'histoires (7 mars 2009)
A partir de ce moment, nous souhaitons suivre plus ou moins le même mode de travail que lors des deux réunions précédentes. Nous permettrons à nouveau aux participants de raconter des histoires et nous leur demanderons de réfléchir aux raisons de ces histoires. Mais cette fois, l'accent sera mis sur les avantages de la diversité linguistique. Nous créerons donc un forum faisant la part belle aux histoires positives. Les participants seront à nouveau répartis en groupes. Il y aura ensuite une discussion plénière au sujet des histoires racontées.

Une histoire générale (6 mai 2009)
La dernière réunion doit être une synthèse de toutes les réunions précédentes. Nous voulons vérifier en compagnie du groupe entier ce que ces histoires nous ont appris. Et comment on pourrait peut-être raconter une autre histoire à l'avenir. Le but – nous l'espérons – est d'infirmer les histoires négatives en les plaçant à côté des histoires positives. Nous voulons donc que les participants recherchent eux-mêmes dans les histoires positives des réponses aux histoires négatives. En fin de compte, nous pourrons imaginer tous ensemble une histoire générale reconnaissable par les deux communautés linguistiques.

5. Bibliographie
- Boje, David M., (1991). ‘The storytelling Organization: A study of Story Performance in Office-Supply Firm’. Administrative Science Quarterly, 36, p. 106-126.

- Bonilla-Silva, E., Lewis, A. & Embrick D. G. (2004)’ “I Did Not Get That Job Because of a Black Man...”: The Story Lines and Testimonies of Color-Blind Racism’ Sociological Forum, Vol. 19, 4, p. 555-581.

- Chalvon-Demersay, Sabine (1994) Mille scénarios : Une enquête sur l’imagination en temps de crise. Paris, Éditions Métailié, p.193.

Fondation P&V | Note of intent: Dutch-speakers and French-speakers:

"Dutch-speakers and French-speakers: how can we exchange our thoughts with one another?"
A forum of stories


1. Introduction
The introduction is where we will explain how the P&V section of the European project on intercultural dialogue will operate. This European project has set itself three goals:

- To develop a platform for reflecting about cultural dialogue, the significance and meaning of the concept and its relationship to European citizenship;
- To compare perceptions and practices within civil society in the various member states;
- To initiate an intercultural dialogue in the various working groups.

In terms of Belgian participation, attention is focused mainly on the theme of language diversity. Our aim is to establish a forum of stories – or testimonies – featuring approximately forty to fifty voluntary citizens.

We will begin by explaining the issue in brief, after which we will move on to how we view this topic and how we intend to approach it. After that, we will set out our methodology. We will conclude by describing the practical organisation of the way our working groups will meet.


2. “This is how the story goes” or language diversity in Belgium
Belgium became a federal state in 1993 with the Kingdom divided into three Regions (Flanders, Brussels and Wallonia) and 3 language communities (Flemish [Dutch], French and German). In terms of figures, Belgium is divided up as follows:

The Belgian population (2008)
- Brussels Capital Region: bilingual, with a French-speaking majority: 1,048,491 hab.
- Flanders: mainly Dutch-speaking: 6,161,600 hab.
- Wallonia: mainly French-speaking, with a small German-speaking population (74,565 hab.): 3,456,775 hab.
Total: 10,666,866 hab.

Belgium’s history is characterised by a dispute over language. What is known as the community fault-line is just one of three fault-lines that divide the country (in addition to the conflict between Catholics and free-thinkers, and between left and right). Over the course of Belgium’s history, these differences have generated regular conflicts and political strife.

In recent times, community conflict has become more pronounced and acute again. It is described in general, especially by the media, as discord between the two main language groups: French-speaking and Dutch-speaking. This usually takes place in a way that suggests these two language communities are de facto historical enemies that have to adopt a diametrically opposed position to one another.

What is striking in the current version of this community conflict is the lack of dialogue between the language communities. It is highly probable that the ability to speak both languages, certainly in Flanders, has lost ground. The language communities also have no shared education, no shared media, no shared policy on culture and no shared political parties. In fact, the communities can be seen to be growing away from one another.

It is to accommodate this situation that as part of the European project for intercultural dialogue, the P&V foundation has opted to create dialogue between language groups. Because we are losing dialogue and contact with one another, anyone who speaks another language becomes a ‘foreigner’ as it were and out of sheer necessity we lapse into clichés, stereotypes and preconceived ideas that end up with any intercultural life between the various groups of the population becoming bogged down.

Perhaps this is all a good reason to bring the so-say conflicting parties together before we even start out on the project. That way we can get to know and understand one another’s story and point of view. This is also precisely the intention of our working groups. Our aim is to encourage matters intercultural by bringing a group of citizens directly into contact with one another. Not just to discuss things together, but to listen to each other’s stories and in so doing to restart dialogue.

3. “You know the story” or why have a story?
Because anyone who does not speak the same language is sometimes virtually a ‘foreigner’, a direct conversation is often difficult and so tends to be carried out in terms of clichés and preconceived ideas. For that reason, we have opted to take this reality into account and actually intend to place these ‘prejudices’ in the spotlight at our meetings. So our starting point is to hear stories or testimonies about the language diversity in Belgium, and not to have a political discussion about the current community conflict. There are two reasons for doing this: the first is at the level of society itself, in the sense that we want to focus on how a society is organised. The second reason is at the level of the working groups and relates to the dynamics involved in a dialogue. I agree with these two reasons for our choice of methodology in opting for a forum of stories or testimonies.

3.1 “The moral of the story” or the perspective for the way of thinking
To form an identity, people as well as whole societies use stories to get their point across. Stories are often used to explain a person’s own position, as well as to justify our problems and misfortunes. In which case some people also say that humans are actually animals that tell stories.

However, as a society we also need a way of organising ourselves and above all to justify our social order. Throughout our history, stories have been used as an accessible means of doing just that. From the Greek myths right through to Hollywood stories have been used to explain our emotions, values and habits to one another.

When these stories are used to give shape to social values and standards, they are also called ways of thinking. Ways of thinking can be understood as general stories that try to give unity to a group of people. Which means that we use a story as a tool to explain the past and present of a society to ourselves and to others.

These ways of thinking are then taken on by a certain group in society and understood by virtually everyone. Their importance comes in particular when problems exist between a particular group and the rest of society. In that sense, ways of thinking in the form of stories have a therapeutic function. They help us to express our problems and feelings in a very familiar form. A story helps us to designate and interpret our environment and what happens in it.

The fact that stories play a role in defining, explaining and using social values is well illustrated in the research of Bonilla-Silva, Lewis and Embrick. They demonstrated how white Americans attempted to justify their attitude to their black fellow citizens using a series of recurring stories (2004). David Boje also showed how people use story structures in everyday life. He monitored the staff of an office accessories company and discovered that they explained the company and their own role in by way of a story (1991). He noted that there were lots of mutual stories about work poured into a fixed story structure. As if the complex organisation of a company was easier to understand for employees like this. Barbara Czarniawska gives a similar example when she went to listen to the stories being told by mechanics and concluded: “The technicians’ stories are not ‘organisational stories’; they are ‘stories that organise’” (p.40, 2004). The fact that social values and problems can be placed easily in narrative structures was shown in an unusual way by Sabine Chalvon-Demersay. Using an analysis of 817 television scripts submitted for a competition, she showed how the same social ways of thinking kept recurring. Despite the wide variation in themes and subjects, she kept discovering how people are able to get along without any social bond. All of which also explains the major impact that the media has on social development and the formation of values. The media is constantly serving up stories about the world we live in and the problems that surround us. That way the media can act as a sort of psychoanalyst who transforms our worries, doubts and feelings of malaise into true and understandable stories.

And when it comes to language diversity, we each have our own story ready. This in the first place is because the ‘other parties’ are not always directly in contact with one another. So if we want to understand the issues between Flemish-speakers and French-speakers, we need to start by looking at the stories that they tell about one another. At how the discrepancy between these two communities is converted into a story structure. What stereotypes, clichés and prejudices are used? So an initial reason for having a forum of stories is that we can assume from it that stories represent an important mechanism in a society and that we find stories the easiest way of putting our social discords and ideas into words to get them across. For that reason, we hope that the working groups can tell us their stories about ‘foreigners’ who speak other languages as a way of exposing the underlying social way of thinking.

3.2 “Tell me your story” or public dialogue
There is however a second reason why we have very deliberately opted to establish a story forum and this has to do with the group dynamic itself. The problem that people often experience in discussions within a group is that things can quickly lead into a heated discussion. Indeed, the big disadvantage of a discussion is that it sometimes requires a great effort on the part of the participants. Not everyone is as good at saying what they think. But then not everyone is sure of their opinion either. When this happens, the big drawback is that a silent majority is created or there is a group of people who cannot or dare not say anything more. Yet we want to hear what these people are thinking and what they have experienced in their lives. We shouldn’t always go looking for who is right, but should also try and learn from one another.

So this is also the reason why we are looking to shift our intercultural dialogue from a discussion or debate structure and replace it with a forum of stories. In particular we believe that we cannot expect everyone to be able to begin a dialogue in an unprejudiced way. Which is precisely why we want to give them a way of expressing these prejudices, clichés and stereotypes without being interrupted by their fellow participants. A story forum is the ideal way to achieve this aim.

Basing ourselves on this idea, a story forum should be able to deliver two practical advantages: on the one hand it may enable us to help the participants in the group to build up an identity, and on the other hand the other participants will better understand the perspective of that identity.

The fact that telling a story can help us to build up an identity has to do in the first place with how it allows us to put our own experiences into words and then link the two. A story enables us to reconstruct what we know, hear or have seen. We are able to make recognisable ‘characters’ of ourselves and/or other people as part of our social story.

Which brings us to the second advantage of a story forum: namely the opportunity to understand another person’s point of view or perspective. That way we are able to understand stories as a way of making it clear to other people how we see things. For example, we can explain more easily when and how something happened. And by doing this, the other person gets to know the story behind you and your opinions. In a group dialogue, this enables us to identify ourselves better with the people we are talking to.

In these two ways, a story forum can form a bridge between the participants so that a public dialogue becomes possible with as few silent participants as possible. It is a bridge that is necessary if we are to get a discussion up and running within two language communities.

4. “Let’s get the story straight” or searching for a better story
The aim of our working groups is to create an intercultural dialogue rather than an intercultural discussion. A dialogue that ultimately leads to a solution or to ‘a better story’. This can be achieved by getting a group of people together to about five meetings and having them confront one another with their stories or testimonies. Our meetings have three aims: telling stories, reflecting together about these stories, and searching for a ‘better’ story.

What we have to do is start by extracting testimonies, experiences and prejudices from the participants and enabling them to share them with each other in an undisturbed way. By doing this, our aim is to make it easier for them to express their position as a French-speaker or Flemish-speaker. And the best way of doing that is to give them the opportunity to tell everything in the form of a story or testimony.

But isn’t the aim that we should communicate with one another? Yes, but only in the second phase. Once we have heard the stories about each other, we will then be able to understand the other participants a little bit better and know what their points of view are.

To make subsequent reflection possible about the stories, a scientific analysis will be carried out about the stories told aimed at bringing the most popular stories to the fore. Which clichés, stereotypes and prejudices keep on cropping up? What are the problems that people see most often in a country where there are two languages? So we will go looking for a few recurring stories and then present them again. That way we hope to have a more subtle dialogue, rather than a discussion.

Finally, this dialogue has to lead us somewhere – preferably to a communal story. Our ultimate aim is to come up with a story that is identifiable for both French-speakers and Flemish-speakers. And to do that we not only want to compare their stories, but also look for both positive and negative stories that the two language groups have about one another. By doing that, we hope to create an overall picture that results in a story that transcends language.

In practical terms, this means that we will divide the five meetings approximately as follows:

What is a story forum? (26th November 2008)
Our aim at this first meeting is mainly to motivate the participants and explain what a story forum is. So in particular we need to make it clear why we want to hear their stories and how these stories can ultimate lead to a dialogue. And to do that, after providing clarification about the origin and structure of the research, we will also be giving a few examples of stories.

At the end of this first meeting, the participants will leave with a practical assignment to come up with a negative story. Which means they will have to use their experiences from other people or the media to present a testimony that for them illustrates one of the problems posed by Belgium’s language diversity.

First story forum (13th December 2008)
The aim of the second meeting is to give the participants the opportunity each to tell their story. This will be done in the first instance in small groups, after which there will be a more general dialogue. French-speakers and Dutch-speakers can then each point out in their own language what the problems are and how they see their own or other people’s position.

At the end of the first story forum, the participants can start helping the researchers in their search for their way of thinking. They will be able to reflect for the first time about what these stories actually contain and why they are being told. Among other things, they will also be asked to distinguish between what they feel are the ‘true’ facts and what is prompted by their ‘feelings’.

Feedback to the participants (4th February 2009)
Based on the stories provided, the third meeting should produce a dialogue. By now, the researchers have had the time to analyse the negative stories and to see how general they are. The intention is for us to give feedback to some stories and put a number of questions to the participants:

- Is this way of thinking recognisable?
- Is this way of thinking understandable?
- According to them, where does this way of thinking come from (the media, politicians, history, etc.)?
- Do they agree with the way of thinking?

In the end, what it boils down to is that we want to test the content of truth and content of recognisability with the group.

At the end of this public dialogue, we will again give participants the task of coming up with a story, only this time we want them to think about the advantages or how we benefit from having a bilingual country such as Belgium. What positive experiences have the participants had with the other language community? Or what have they ever heard about the ‘others’ that pleasantly surprised them?

Second story forum (7th March 2009)
From here we want to follow more or less the same methodology as for the previous two meetings. We will again give the participants the opportunity to relate stories and will ask them to think carefully about the reasons behind these stories. But this time, the emphasis will be on the benefits of language diversity. So our aim here is to create a forum in which positive stories take centre stage. Once again the participants will be divided into groups, after which there will be a plenary discussion about the stories told.

A general story (6th May 2009)
The final meeting needs to provide a summary of all the previous meetings. At this meeting, our aim is to see with the whole group what all these stories have taught us. And how perhaps in the future it can be a different story. It is our objective, and to be hoped, that some of the negative stories can be made less negative by placing them next to the positive ones. So we want the participants themselves to use the positive stories to go looking for answers to the negative ones. In the end, we should then be able to come up with a sort of general story with which both language communities are able to identify.

5. Bibliography
- Boje, David M., (1991). ‘The storytelling Organization: A study of Story Performance in Office-Supply Firm’. Administrative Science Quarterly, 36, pp. 106-126.

- Bonilla-Silva, E., Lewis, A. & Embrick D. G. (2004)’ “I Did Not Get That Job Because of a Black Man...”: The Story Lines and Testimonies of Color-Blind Racism’ Sociological Forum, Vol. 19, 4, pp. 555-581.

- Chalvon-Demersay, Sabine (1994) Mille scénarios : Une enquête sur l’imagination en temps de crise. Paris, Éditions Métailié, p. 193.

Projet CID : Citoyenneté, Interculturalité, Dialogue

"Citoyenneté, Interculturalité, Dialogue" est un projet transnational inscrit dans le programme "L'Europe pour les citoyens" de la Direction générale Education et Culture de la Commission européenne. Ce projet est porté par le Pôle européen des fondations de l'économie sociale avec la participation de 6 partenaires de 5 pays européens :
- CSV (Royaume Uni),
- Fondation EAES (Espagne),
- Fondation Macif (France),
- Fondation Pact (Roumanie),
- Fondation P&V (Belgique),
- Pour la Solidarité (Belgique).
Le but du projet est de créer une plateforme d'échanges et de réflexion sur le thème du dialogue interculturel, en comparant les perceptions et pratiques de la société civile au sein des différents états membres.
Le lancement du projet a eu lieu à Osuna (Espagne) le 22 septembre 2008, au cours duquel les partenaires des 5 pays ont choisi une thématique de travail qui fera l'objet de dialogues et de débats durant 6 mois avec un groupe constitué de 40 personnes représentatives de la société civile dans chacun des pays des partenaires.

CID Project : Citizenship, Interculturality, Dialogue

"Citizenship, Interculturality, Dialogue" is a transnational project that comes within the framework of the programme "Europe for citizens" of the Directorate-General for Education and Culture of the European Commission. The European network of foundations for social economy leads the project with the participation of 6 partners from 5 european countries :
- CSV (United Kingdom)
- EAES Foundation (Spain)
- Macif Foundation(France)
- Pact Foundation (Romania)
- P&V Foundation (Belgium)
- Pour la Solidarité (Belgium)
The goal of the project is to create a platform for exchanges and reflection on intercultural dialogue, comparing perceptions and practices of civil society within different member states.
The kick off meeting of the project took place in Osuna (Spain) on the 22nd september 2008.
There the partners of the five countries chose a working theme which will be discussed by the groups of 40 citizens created in each country, during 6 months.